HAUTE COUTURE HORLOGÈRE : UN SAVOIR-ÊTRE. RENCONTRE AVEC MICHEL PARMIGIANI



Rencontre avec le maître horloger Michel Parmigiani, créateur de la marque suisse Parmigiani. Au programme : expression de la singularité des métiers d’art et de la nécessité de les pérenniser, bien sûr, mais aussi inspiration voire mysticisme. Lumière sur la beauté des métiers d’art !

Chez l’horloger suisse Parmigiani Fleurier, les mots maison « mesure » et « démesure », par ailleurs titre de l’excellent documentaire sur sa manufacture récompensé lors de la 5ème édition du Grand Prix du Brand Content, emmènent infiniment loin dans l’exigence de la création horlogère de luxe. De quoi s’immerger, avec bonheur, dans son univers où les savoir-faire d’exception donnent leurs lettres de noblesse à ces mots trop souvent galvaudés :« sur mesure », « manufacture », « haute horlogerie » ou encore « haute couture » utilisés à tort à travers dans la création contemporaine tous secteurs confondus.  Avec Parmigiani Fleurier, ces mots nous ramènent aux racines d’une création de haute horlogerie dotée de précieuses vertus : apaiser la soif vitale pour le beau, l’unique et l’authentique !

L’honnêteté de la création. S’il y a bien un message à retenir de la maison horlogère suisse Parmigiani Fleurier, c’est celui-ci, souligne son PDG, Jean-Marc Jacot. Hormis les connaisseurs à même d’apprécier les subtilités des modèles à grandes complications – ces ensembles indépendants interagissant les uns avec les autres de façon variable, et non pas « un champ de bataille ! » rectifiait un artisan horloger -,  pas évident de distinguer l’extraordinaire du plus banal. C’est un peu comme s’offrir un tailleur vendu « sur-mesure », une création demi-mesure en réalité. Les exemples ne manquent pas !

Michel Parmigiani. photo : Parmigiani Fleurier

Puiser dans l’histoire de la création horlogère pour faire rêver

« Dans n’importe quel métier, c’est bien de regarder d’où l’on vient, cela permet de se projeter dans le futur, selon Michel Parmigiani, et de faire perdurer le rêve car le banal tue l’émotion ». Pérenniser un savoir-faire artisanal et traditionnel aujourd’hui : une « nécessité ». Imaginons un instant qu’un savoir disparaisse comme cela fut le cas avec l’émail dont on ignore aujourd’hui comment il se faisait dans les années 1850 avant de disparaitre, et de revenir à la mode aujourd’hui. Il suffit qu’une personne s’en aille, et le savoir-faire peut disparaitre.  « Il faut tout réinventer. Cela  peut nécessiter des siècles d’expérience », insiste celui qui est aussi restaurateur de pièces horlogères. Des missions abordées, à chaque fois, comme des « enquêtes à résoudre », confie-t-il enjoué, « c’est comme être Sherlock Holmes! » Le respect pour de traditionnels savoir-faire, sources de créativité pour le présent et le futur, est la réponse de l’artisan horloger à l’argument darwinien, anti-patrimonial, parfois utilisé de nos jours, justifiant une disparition considérée comme « naturelle » dans le monde contemporain censé aller de l’avant.

Plus précisément, et c’est là un point de vue que seul un artisan peut évoquer :

« le savoir-faire, ce n’est pas une recette, cela on sait faire, mais c’est la manière de faire une fois que l’on maitrise les informations théoriques.  C’est par le geste, le regard et l’appréciation de la couleur, par exemple, que tout se joue. L’artisan ressent le moment précis où son geste doit intervenir.  Nous n’avons pas le temps d’expliquer. » C’est cela qui prend du temps à acquérir. Et de conclure : « être artisan d’art, c’est une question d’éducation, de culture, d’entrainement, de gymnastique. »

Sur ce qui l’inspire, Michel Parmigiani se confie sur le nombre d’Or, référence à l’utilisation du langage mathématique de la beauté décelé dans la nature, l’art ou encore le corps humain. La règle géométrique, soit le secret de la proportion divine appelé nombre d’Or ou Phi, selon l’ouvrage De Divina Proportione de Luca Pacioli, n’aura de cesse d’inspirer les créateurs dans les champs artistiques de la peinture, sculpture et architecture depuis l’Antiquité. « C’est une histoire qui va très loin, je n’ai pas peur de dire que c’est divin », assure, avec ardeur, le passionné d’architecture et de dessin dès son plus jeune âge.

Cette explication de la beauté par la mathématique qu’on retrouve dans la construction des Pyramides, des colonnes grecques, de Frank Lloyd Right ou encore de Gaudi sont autant de témoignages inspirants de la magie de ce nombre d’Or, pour l’artisan horloger. « La courbe naturelle », Michel Parmigiani la cite souvent. « Ce sont les courbes de la pièce horlogère que l’on devine à partir d’un point imaginaire. Elle est génératrice de formes et de proportions. Intuitivement,  ça va tellement loin, confie l’artisan horloger, cela devient mystique. »artisanat d'art, parmigiani, the daily couture, stephanie bui

Modèles Tonda Qualité Fleurier & Pershing 002, Parmigiani, the daily couture, stephanie bui

Un savoir-être au-delà d’un savoir-faire

« Voir des pièces inertes qui peuvent se mettre à avoir un mouvement toutes seules, sans aucune énergie électrique ou je ne sais quoi ! Non… simplement du métal ! C’est quand même incroyable ! Donc oui, on donne vie à quelque chose », s’émeut une jeune femme qui eut le coup de foudre pour son métier d’horloger qui, techniquement, doit relever le défi de faire bouger, en cohérence, 27000 fois par jour, des pièces microscopiques! En somme, faire naître un univers ! C’est un « dépassement de la technique, de soi-même, aller jusqu’au bout de son art. C’est la démesure », selon Parmigiani Fleurier. Donner la parole aux artisans d’art trop souvent réduits à leurs mains : c’est là tout l’intérêt et la force du documentaire « Mesure et Demesure » réalisé par Frédéric Laffont, présenté en même temps que la nouvelle Tonda Metrographe, à Paris, en mars dernier. Avec un esthétisme rappelant les portraits de la peinture flamande idéalisant l’individu, l’artisan est capté dans sa singularité. Des visages émus, amusés, parfois amusants évoquent à merveille ce métier : une vocation pour la création horlogère.

Pour certains, quand on prend le temps d’y pénétrer avec une loupe à l’œil, la montre devient « une immense cathédrale où l’on peut se promener comme un insecte » ou encore « un cœur qui bat et qu’il faut maintenir en vie ».  Alors une attention à tous les sens est exhortée. Parfois de la finesse d’un cheveu ou d’un mu, soit un millimètre divisé par mille, la pièce exige l’appel à d’autres sens que la vue augmentée : l’ouïe, afin de reconnaitre le bon bruit, le signe d’une manipulation réussie, et le toucher. « Avec les doigts, je sens de quel côté est le pivot de six centièmes. Le toucher est hyper important. Ça s’apprend, on caresse le mu tous les jours ». La nécessité de devoir travailler parfois de six à douze heures une seule pièce microscopique exige  « la maîtrise de ses doigts, de son corps, de son esprit et de son attitude pour travailler du tout petit. On doit être perfectionniste. »  Avec humilité.

Quand surviennent des bugs,  « le troisième œil » est nécessaire : celui du collègue. Le stress, la hâte, l’énervement ? A bannir. La douleur, elle, s’impose parfois :   les doigts sont ensanglantés à force de limer… En toute circonstance : persévérer.  « Quand on roule un axe de balancier, explique un artisan de la manufacture, on roule un cheveu. C’est vite blessé, plié. Il faut être calme et rien lâcher. Il faut être teigneux… Si on lâche, on s’énerve, c’est fini. On ne fera  jamais la pièce. La satisfaction est là : est-ce que j’ai tout fait pour arriver à mon résultat ? Et puis, la pièce, elle est là (…) Le début, c’est comme un accouchement, et après on peut toujours améliorer. »

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Transmettre les valeurs de l’excellence horlogère

« Si vous n’avez pas la notion de transmission dans un métier de la haute horlogerie comme le nôtre, il ne faut pas le faire », conclut Jean-Marc Jacot. Afin de pérenniser ses savoir-faire, vingt apprentis à partir de 15-16 ans sont formés chaque année, pendant que cinq autres terminent leur cursus avec, à la clé, l’assurance de trouver facilement un emploi  dans l’un de ces métiers : horloger, micro-mécanicien, commercial, cadranographe, décolleteur… De quoi assurer la pérennité de ces métiers restés si mystérieux pour la plupart, et si précieux à l’entreprise. Situé dans le berceau de l’horlogerie suisse qui comptait 600 horlogers en 1860, Fleurier en compte environ 200 aujourd’hui avec Michel Parmigiani venu, en précurseur, s’installer dans le village en période de crise horlogère. C’est parce qu’il ne trouvait plus de composants que la manufacture fut contrainte de répondre à ses propres besoins. Sa maitrise en interne de la fabrication de tous ses composants de pièces horlogères, soit une expertise devenue très rare dans le secteur horloger, ont fait de la manufacture le fournisseur d’une vingtaine de marques horlogères.

La belle aventure de Parmigiani Fleurier, créée avec le soutien de la  Fondation Sandoz, se poursuit avec sa marque horlogère, concevant 5500 pièces par an, et amenée à se développer, dans le monde entier, avec l’ouverture de ses ateliers boutiques rassemblant ses modèles à grandes complications iconiques et nouvelles lignes contemporaines urbaines comme la nouvelle et superbe Tonda Qualité Fleurier à l’esthétisme vintage ou ses montres bijoux réalisées en collaboration avec le joailler milanais Pomellato.

Et aux invités de Parmigiani Fleurier comme à la presse de s’immerger dans les valeurs ancrées dans la tradition horlogère chère à sa marque par l’expérience d’un vol en montgolfière, par exemple ! Surprenant ! pense-t-on à première vue… Or « l’ADN du vol en montgolfière et celui de la création horlogère de Parmigiani Fleurier sont étonnamment similaires. » répond le PDG, Jean-Marc Jacot. Interviewé par The Watchers à ce sujet précisément, le PDG insistait alors sur la tradition. « Les gens qui aiment les vols en montgolfière aiment la tradition comme les artisans horlogers qui travaillent à la manufacture de Parmigiani. Il y a la tradition et l’éthique de la création. Que ce soit un vol en montgolfière ou une pièce horlogère, compare Jean-Marc Jacot,  on sait quand on commence à préparer son activité, on sait où l’on veut aller mais on ne sait pas quand on va y arriver ni combien de temps sera nécessaire pour y arriver … »

The Daily Couture a vécu cette belle expérience le 27 mai 2014 à l’occasion de la 22ème édition du Trophée François 1er, la compétition internationale de vols en montgolfière dans la Vallée de la Loire avec notre aérostier Raphaël Zuccollo du ballon Parmigiani Fleurier.

Slow Travel, Slow Made : même valeurs, même combat !

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Site de Parmigiani Fleurier

Le nombre d’Or, le livre de la collection présentée par le mathématicien  Cédric Villani

 

 

 

 

 

@thedailycouture Depuis 2011, à la demande, the Daily Couture organise des immersions dans les Ateliers Haute Couture à Paris travaillant pour les plus grandes maisons de mode. Envoyez-nous votre demande : info@thedailycouture.com 

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