DESTINATION L’AQUITAINE : DANS UN MONDE DU CUIR EN PLEIN BOOM (2/3)



Reportage. Les Portes du Cuir 2022 : à Saint-Junien, les professionnels racontent les métiers du cuir en vrai.

ganterie maroquinerie saint junien hermès

Le 28 juillet 2022

« Nous, on n’a jamais vu sur le territoire des besoins en recrutement dans la filière du cuir aussi importants à échéance très courte », constate Laëtitia Doulcet, animatrice de ResoCUIR, le cluster de la filière aquitaine du cuir, créé en 2017, à qui l’on doit notamment la fructueuse mise en réseau de fleurons tels que Hermès, Repetto, JM Weston, Rubi Cuir ou encore Agnelle. A tel point que l’événement organisé par l’association, Les Portes du Cuir, réunissant professionnels et grand public, est devenu un rendez-vous essentiel. C’est dans la cité gantière de Saint-Junien envoûtée par la noblesse du cuir (volet#1 du reportage consacré aux Portes du Cuir) que se tenait la biennale du 17 au 19 juin dernier. Outre l’enjeu majeur de la RSE au cœur de l’édition 2022, les priorités de la formation et du recrutement continuent de s’imposer pour la filière déclarée « prioritaire » en Aquitaine. Ce qui s’explique par « une explosion de la demande pour l’excellence à la française au sein de la filière cuir à l’international », se réjouit l’animatrice du cluster. Aux 4000 salariés du cuir en Aquitaine, un recrutement de 1500 à 2000 personnes est pré-estimé. Dont 500 recrutements à l’aune de la future implantation par Hermès de deux manufactures dans la région, précise la maison : en Charente, à l’Isle Espagnac, en 2025, et en Gironde, à Loupes, en 2026, en plus du recrutement en cours, dans le limousin, par la ganterie-maroquinerie de Saint-Junien, le seul site de fabrication des gants Hermès. Soit les 23e et 24e ateliers de maroquineries de la maison, tous situés en France.

recrutement des métiers du cuir par Hermès

Sans oublier tout l’écosystème impacté. Comme la belle histoire entrepreneuriale de Rubi Cuir, fabricant de sous-ensemble en cuir pour la maroquinerie de luxe, implantée à Boulazac Isle Manoir, en Dordogne. « L’entreprise puise sa raison d’être dans l’accompagnement de la croissance de nos clients dans la maroquinerie du luxe, commente Raphaël Laval, directeur général de Rubi Cuir. Nous avons donc bâti un plan de croissance ayant l’objectif de doubler la capacité de production avec un plan ambitieux de 90 embauches, la construction d’un nouveau bâtiment et l’acquisition du nouveau matériel industriel nécessaire ». Le sous-traitant envisage d’atteindre les dix millions d’euros de CA en 2022. « En 2023, nous visons 250 personnes sur le site, et je pense qu’on peut aller au-delà pour 2024 et 2025. » Une exemplarité, par ailleurs, saluée, en 2021, par la visite officielle de la ministre déléguée chargée de l’Industrie.

rubi cuir recrutent en aquitaine
Région Nouvelle Aquitaine, 5 septembre 2021, Boulazac (à proximité de Périgueux, en Dordogne), Entreprise Rubi Cuir, fabrication de produits en cuir et en tissu pour des grandes marques de luxe.

une redéfinition du métier du cuir 

Dans ce contexte de forte demande pour les métiers du cuir, la réalité de la production ne doit pas pour autant être « idéalisée », insiste Laëtitia Doulcet. « Même si le produit reste artisanal, car c’est la main de l’homme qui fabrique le sac, la réalisation est issue de l’intervention industrielle avec, par exemple, la découpe numérique et d’autres gestes qui peuvent surprendre les apprenants de la maroquinerie. Il ne faut pas leur vendre du rêve. Cela crée des déçus : ils s’attendaient à vivre cet idéal de la maroquinerie de l’excellence à la française tel qu’ils l’imaginaient ». A l’image de communications publicitaires et de l’objectif pédagogique des écoles du cuir : pouvoir réaliser une pièce en cuir de A à Z. « Quand les apprentis se retrouvent à faire des stages en entreprise, campés derrière un poste de travail, ils peuvent dire : « Non mais c’est pas du tout ce que je veux faire. La réalité du terrain et de l’emploi dans la filière cuir majoritairement dans le monde, c’est ça. » Pour le directeur général de Rubi Cuir, le problème relève, en priorité, d’une méconnaissance, aujourd’hui, de la réalité industrielle en France. « C’est une défaillance du système éducatif français qui explique que l’on ne se soit pas intéressé au fonctionnement d’une entreprise quelle qu’elle soit ». Pour appréhender la réalité du terrain, rien de tel qu’un stage en immersion (PMSMP)* proposé par Pôle Emploi, sans conditions aucune, recommande, Fabienne Boulanger, forte de son parcours professionnel aux mille et une vies : d’ancienne ouvrière textile expérimentée à formatrice en sellerie générale, au Campus des Métiers Cuir Textile, Mode et Luxe à Thiviers au Lycée Porte d’Aquitaine.

recrutement des métiers du cuir en aquitaine

Remédier à l’idéalisation du monde artisanal du luxe semble aussi difficile que remédier à la stigmatisation du travail en usine et à la méconnaissance du savoir-faire manuel. Pierre-Jean Panelay, conseiller en Formation Continue, à l’agence de Dordogne du GRETA CFA Aquitaine, nous ramène à la réalité : « On n’imagine pas la difficulté que c’est de bien travailler de ses mains. Le loisir, c’est une détente ; on pense souvent que manuel signifie détente. Il n’y a pas d’objectif, on ne vend pas de produit, on n’a pas affaire à un client. Mais pour vivre d’un travail manuel, on doit maîtriser des techniques et la capacité à faire du beau travail. C’est difficile. Cela exige de la motivation et de l’investissement pour acquérir le niveau nécessaire pour en vivre », réévalue l’expert. Pour Fabienne Boulanger qui a « toujours connu le chronomètre » en qualité d’ancienne ouvrière textile, les jeunes « ont du mal » avec la mesure de la qualité du travail en usine, appelée depuis les années 90 « le suivi de progression », en remplacement d’un mot qui ne passe plus, aujourd’hui : « le rendement » d’un travailleur. « C’est la mesure de la qualité, témoigne-t-elle, dans toutes les entreprises du cuir. Dans les petites entreprises, il n’y aura pas de chronomètre, mais l’artisan saura combien de temps est nécessaire pour faire un objet ».  De quoi remettre les pendules à l’heure, et se rendre compte de l’impact de l’imaginaire des communications à tout-va sur le monde artisanal.

pierre jean panelay, conseiller formation continue cuir greta aquitaine

 

ciseaux de gantier ©LaVilledeSaintJunien
Confection de la ganterie. Patrimoine industriel de la ganterie à Saint-Junien. Ciseaux de gantier ciseaux de gantier ©LaVilledeSaintJunien
Confection de la ganterie. Patrimoine industriel de la ganterie à Saint-Junien. Ancienne machine à coudre -surjeteuse de la marque Brosser Bergmann Huttemeier de Copenhague. Elle permet de découper six gants à la fois.
Confection de la ganterie. Patrimoine industriel de la ganterie à Saint-Junien. Ancienne machine à coudre -surjeteuse de la marque Brosser Bergmann Huttemeier de Copenhague. Elle permet de découper six gants à la fois. ©LaVilledeSaintJunien
En interview avec Sylvie Trijeaud, responsable qualité à la ganterie-maroquinerie de Saint-Junien, aux Portes du Cuir
en interview avec Sylvie Trijeaud, responsable qualité à la ganterie-maroquinerie de Saint-Junien, aux Portes du Cuir 18/06/22

Il est dit que pour devenir un très bon maroquinier, il faut au moins cinq ans de vie professionnelle. Une fois en prise avec la réalité du métier en usine, des perspectives d’évolution sont possibles. « La polyvalence en entreprise leur permettra d’évoluer. Rien n’est figé », rassure Laëtitia Doulcet. Cette envie de polyvalence, de diversité, de rapidité par des jeunes qui veulent aller vite, les industriels peuvent y répondre, assure le directeur général de Rubi Cuir :  « Aujourd’hui on ne parle plus de spécialisation, car on doit être capable de tout faire dans l’entreprise. On n’est pas spécialisé en haute couture ou en parage. Le terme « opérateur » est générique. Nos métiers, ce sont maroquiniers, maroquinières. Et l’avantage en qualité d’organisation dite industrielle, ce sont les nombreuses opportunités. On ne commencera pas à un poste pour y rester quarante ans. Ça n’existe plus. C’est ce qui rend attrayant le monde de l’industrie, le nôtre en particulier, car on va pouvoir apprendre plein de choses, s’essayer à différents postes, différents gestes et différentes marques. Ce qui est très riche et répond à une attente des jeunes. » Enfin, la montée en compétences au sein des entreprises peut mener à des évolutions professionnelles épanouissantes. En témoigne le cheminement de Sylvie Trijeaud, 47 ans : d’un salon de coiffure à la ganterie-maroquinerie de Saint-Junien, chez Hermès. « Quand je suis arrivée dans la maison, je n’imaginais pas faire ce que je fais aujourd’hui ». De son poste d’artisan au sein de la manufacture charentaise de Hermès, à Montbron, en 2012, elle devient formatrice en petite maroquinerie à Saint-Junien, en 2016, puis responsable qualité sur le site, en 2018. « J’ai trouvé ma place à la qualité : je reste au contact de tous les artisans à m’assurer de la qualité sans concession. »

La ganterie-maroquinerie de Saint-Junien appartenant à Hermes @Benoît Teillet
La ganterie-maroquinerie de Saint-Junien @Benoît Teillet

Le goût de l’usine

Aux apprentis en sellerie rechignant à un travail en usine, Fabienne Boulanger leur rétorque : « J’ai toujours été en usine, ça a été mon plus grand plaisir ! » Bien loin de la persistante image misérabiliste du monde ouvrier, l’ancienne employée textile raconte un peu de sa vraie vie en usine. A l’écouter, il ressort l’impression d’une sorte d’apprivoisement de gestes  comme s’il s’agissait d’une œuvre chorégraphique autant mentale que physique ! Un travail vivant, enrichissant, et dont l’expérience subjective ne demande qu’à être exprimée et reconnue.  Ce que plaide l’économiste Pierre-Yves Gomez : faire sortir les travailleurs de l’anonymat, de l’invisibilité, condition indispensable pour la dignité des travailleurs quels qu’ils soient, et la création de valeur, dans la durée, dans l’entreprise.

A ses apprentis, elle recommande la technique de visualisation : imaginer dans l’espace comment atteindre un résultat. Une fois derrière le poste de travail, l’objectif :  réussir à trouver sa propre technique, sans exception. Car, devenir polyvalent ne suffit pas, il faut devenir autonome : la capacité à réaliser un geste seul, distingue la formatrice.  Pour cela, apprendre de chaque technique des autres collaborateurs, se les approprier pour trouver la sienne. « Si j’allais travailler chez Hermès, imagine-t-elle, je m’approprierais la technique donnée pour qu’elle me convienne et devenir autonome ». Et de conclure : « On n’est pas des robots ! » Une sensation de toucher du doigt une possible vraie vie épanouissante en usine. Car, il s’agit de mettre en oeuvre « une logique pour ne pas s’épuiser » et un apprentissage pour « attraper la bonne cadence » – et non à faire le plus vite possible. Apprendre à « gérer son énergie ». « Votre machine, c’est votre outil de travail. Votre corps, c’est votre machine aussi. Les trois organes qui vont permettre de dompter votre machine : vos yeux, vos mains et vos pieds. Avec vos mains vous guidez la matière, savez comment la manier ; vos yeux vont vous permettre de regarder vos mains et votre machine en même temps pour pouvoir bien diriger vos mains ; et vos pieds vont vous permettre de dompter la machine. ». La machine, c’est sa  « copine », s’amuse-t-elle.

Région Nouvelle Aquitaine, 5 septembre 2091, Boulazac (à proximité de Périgueux, en DordognEntreprise Rubi Cuir, fabrication de produits en cuir et en tissu pour des grandes marques de luxe
Région Nouvelle Aquitaine, 5 septembre 2021, Boulazac (à proximité de Périgueux, en Dordogne), Reportage photos, Entreprise Rubi Cuir, fabrication de produits en cuir et en tissu pour des grandes marques de luxe

RUBI CUIR

 

« Tout le monde devrait aller à l’usine ! Déjà, ça apprend à vivre » Fabienne Boulanger, ancienne ouvrière textile expérimentée devenue formatrice en sellerie générale, au Campus des Métiers Cuir Textile, Mode et Luxe à Thiviers au Lycée Porte d’Aquitaine

De même, les maroquinières chez Hermès rencontrées lors des Portes du Cuir semblent avoir trouvé chaussure à leur pied auprès de ce grand nom du cuir. Il faut dire que l’environnement de la maison y participe. La devise « faire du beau dans du beau » de Jean-Louis Dumas, membre de la 5e génération et gérant d’Hermès de 1978 à 2006 reste chère à la maison. Désormais, commente l’entreprise, pour l’implantation des nouveaux sites de maroquinerie, Hermès privilégie la reconversion des anciens sites industriels ou friches chaque fois que c’est possible. Comme pour  l’implantation et de l’agrandissement de la ganterie-manufacture de Saint-Junien. Cette démarche permet de limiter très fortement l’artificialisation des surfaces tout en poursuivant la croissance de l’activité. Le tout, explique-t-on chez Hermès, en intégrant les enjeux liés à la faune, à la flore et à la préservation des milieux naturels. In fine, bâtir de nouveaux sites de maroquinerie comme s’ils étaient des manufactures de toujours, harmonieusement ancrés dans le territoire.

Au sein de l’écrin saint-juniaud réhabilité, œuvrent les gantiers et maroquiniers d’Hermès, le long des bords de la Vienne. Certains parfois déjà rompus à l’univers de la mode, comme cette maroquinière dotée d’une expérience d’une dizaine d’années en broderie d’art chez la maison Lesage, à Paris. D’autres souvent propulsés dans l’industrie de la mode.  Arrivée dans la maison il y a un peu plus d’un an et demi, Aurélie Fontaine, dans son ancienne vie, fut coiffeuse à Paris, pendant dix ans, avant d’exercer, une fois devenue mère, divers métiers : préparatrice de commande, vendeuse, caissière etc. Accueillant son deuxième enfant, elle quitte la capitale pour Saint-Junien. Un changement de vie au plus près de ses beaux-parents. C’est dans le magasin bio où elle travaille que sa collègue pour l’été, une étudiante, l’informe du recrutement par la ganterie-maroquinerie où travaille sa tante. « C’était une évidence. L’occasion de changer de voie. »  A présent, la trentenaire semble épanouie comme jamais. « J’adore ce que je fais ! On apprend tout le temps. Comme nous on est des petits jeunes, on se dit qu’on verra d’autres modèles ! Pour l’instant, on travaille sur le même modèle depuis qu’on a commencé, mais chaque cuir réagit différemment ; on s’y adapte pour le coudre, le monter ». « Un honneur de représenter la maison aux Portes du Cuir », conclut l’heureuse maroquinière.

Ganterie Hermès®Alfredo Piola
Ganterie Hermès®Alfredo Piola

Parfois, après une formation, les apprentis préfèrent se détourner de grands groupes, attirés par d’autres possibilités offertes par les métiers du cuir et d’autres cultures d’entreprise. « Dans le monde du travail, les salariés, qui sont des citoyens avec des projets de vie qui évoluent, sont ainsi poussés à changer d’entreprise et de métier, constate le conseiller en Formation Continue au GRETA. Nous sommes dans une société où les gens bougent, évoluent. Les remplacer s’impose  quand ils partent. Et quand on arrive à les recruter, il faut les garder. Toutes les entreprises font face au même défi du turnover ».  A l’image du cheminement professionnel de Jeanne Miquau qui a suivi le parcours de la formation interne chez Hermès avant de s’orienter vers la voie de la réparation au cœur du métier de la cordonnerie. Une décision en phase avec un désir d’engagement écologique concret : rallonger la durée de vie de nos produits, et ainsi donner un supplément d’âme aux objets autant qu’à l’action au quotidien.

 A chacun son métier du cuir

jeanne miquau cordonnerie aquitaine

Après des études en évènementiel dans le secteur de la culture, Jeanne Miquau apprend, par un journal, qu’Hermès recrute près de chez elle, en Dordogne, où elle vient d’emménager avec ses parents. Elle présente sa candidature sans trop savoir ce qui l’attendait, d’autant plus qu’un point la titillait : son végétarisme serait-il compatible avec un travail dans le cuir ? Elle se dit, confie-t-elle : « Ne pas mourir bête : on va voir à quoi cela ressemble ». Parcourant avec succès les étapes de sélection et la formation interne, la voilà qui travaille sur le fameux Birkin. A la fin de son CDD, elle décline la proposition de CDI. « Encore jeune, j’ai envie de voir autre chose. Avec le recul, j’ai l’impression d’être restée très critique sur tout mon parcours dans l’entreprise, parce que je ne comprenais pas trop ce que j’y faisais ». Et de conclure : « Je n’avais pas envie de rester pour les mauvaises raisons, j’avais envie que mes valeurs soient plus fortes que le salaire et les sacs Hermès. »  Pour autant, la jeune maroquinière a beaucoup hésité « parce que le salaire était correct, parce que, malgré tout, je savais que je travaillais des sacs du luxe, que c’est une très belle maison qui fait du très beau travail. J’y ai appris des choses que je n’aurais jamais apprises nulle par ailleurs, et je savais qu’en partant, je ne trouverai pas un niveau d’exigence qui est intéressant. »

Cependant, ce n’est pas la question du végétarisme qui la décidera. « J’en ai conclu qu’il ne fallait pas se prendre trop la tête non plus parce que sinon on ne fait rien. » Le déclic arrive grâce à des collègues chez Hermès. Ils lui conseillent de s’orienter vers le CAP de Maroquinerie qui les avait formés, le Campus des Métiers Cuir Textile, Mode et Luxe à Thiviers au Lycée Porte d’Aquitaine. Un établissement pionnier pour l’enseignement aux métiers du cuir dans la région. « Ils m’ont montré le type de travaux qu’ils réalisaient, et je savais que j’y apprendrai des techniques que je n’avais pas encore apprises. Mes collègues m’ont convaincue de postuler à ce CAP car je voulais continuer dans la maroquinerie qui m’intéressait par son aspect manuel. » Diplômée en juillet 2022, c’est vers la cordonnerie qu’elle se dirige à présent. Elle en a trouvé une à Tours qui s’agrandit et recherche des cordonniers spécialisés dans la maroquinerie pour la réparation de sacs et de chaussures. Une nouveau chapitre dans le monde du cuir s’ouvre pour la jeune femme. Or, d’autres parcours s’avèrent plus inattendus.

« Des infirmières candidates à des postes dans le cuir, ces reconversions-là, on s’en passerait. » Pierre-Jean Panelay, conseiller en Formation Continue, à l’agence de Dordogne du GRETA CFA Aquitaine.

Nombreuses sont les reconversions dans les métiers du cuir, constate, in fine, Jean-Pierre Panelay. Chez Rubi Cuir, 80% des personnes qui entrent dans l’entreprise changent de métier : coiffeuse, esthéticienne, etc. Avec une spécificité : 85% de femmes, de tout âge. De 19 ans pour les personnes recrutées en fin de parcours d’apprentissage, à 55 ans pour des reconversions possibles « à partir du moment où les compétences et l’envie sont là », précise Catherine Pierunek, responsable des ressources humaines. Pour autant, ces derniers temps, et c’est nouveau, observe le conseiller en formation, les entreprises recrutent un nouveau type de profil auquel le professionnel de la formation continue ne s’attendait pas à rencontrer aux Portes du Cuir :  « Ce qui me choque, confie Pierre-Jean Panelay, c’est de voir, qu’aujourd’hui, il y a des infirmières, y compris des infirmières de bloc opératoire, et j’ai même le cas d’une sage femme, toutes dégoutées des conditions de travail à l’hôpital et qui veulent travailler chez Rubi Cuir. Former une infirmière, une sage-femme ou une aide-soignante est long et difficile. Même si apprendre un nouveau métier et débuter une nouvelle carrière est très positif, quand on voit une infirmière ou une sage femme abandonner leur métier, pour nous, en tant que société, c’est une perte de compétences et de savoir-faire. Quand l’hôpital se vide, c’est inquiétant. » Ce qui tranche avec les profils habituels : des personnes en recherche d’un métier stable et pérenne, après avoir enchaîné des petits boulots ou souhaitant travailler selon des horaires adaptés à une vie de famille. Ces femmes du secteur médical ne se réorientent pas par passion ou goût du travail manuel. Elles doivent vivre, manger, ont des enfants, habitent dans la région, apprennent que Rubi Cuir recrute et y postulent parce qu’elles doivent travailler. Leur objectif ? Fuir le plus vite possible leur métier du moment. Un constat partagé par Fabienne Boulanger dont l’une des apprenties lui confiait, non pas le stress, mais la pression de son métier à l’hôpital. « C’est pour ça que je dis que l’usine, c’est pas le bagne ! Et que ces personnes sous pression au travail seront peut-être plus heureuses dans une usine du cuir ».

Reportage réalisé en partenariat avec l'Office de Tourisme Porte Océane du Limousin et l'Hôtel Le Bœuf Rouge en accord avec la ligne éditoriale de The Daily Couture.

La future Cité du Cuir de Saint-Junien  ›   le dernier volet 3/3 du reportage

Notes :

ResoCuir

Stage en immersion : Périodes de mise en situation en milieu professionnel – PMSMP

Rubi Cuir – site en construction

Savoir pour Faire

Office de Tourisme Porte Océane du Limousin

The Originals Saint-Junien Le Boeuf Rouge

Sur The Daily Couture : MÉTIERS MÉCONNUS, DÉVALORISÉS OU EN PÉRIL…COMMENT LA FILIÈRE DE LA MODE ET DU LUXE RETISSE LE LIEN ENTRE CONCEPTION ET PRODUCTION

 

2 réflexions sur « DESTINATION L’AQUITAINE : DANS UN MONDE DU CUIR EN PLEIN BOOM (2/3) »

  1. Le monde du cuir: un metier, une odeur bien caracteristique, un savoir faire manuel….le gout pour un travail bien fait dans l univers du luxe. Joli résumé qui nous donne envie et qui me redonne envie de renouer avec le metier de selliere maroquiniere que j ai exercé avant d arriver sur Bergerac. Vous parlez de PMSMP, est il possible d effectuer une immersion ( chez Ruby Cuir) même si je suis salariée d une autre entreprise?

    1. Merci pour votre commentaire ! Oui, d’après ce qu’on m’a dit. Il suffit de vous renseigner auprès de Pôle Emploi. En théorie, le temps d’immersion dépend de vous et de l’entreprise. Bonne continuation à vous !

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