VITO ARTIOLI : SON COMBAT POUR LA DÉFENSE DU SAVOIR-FAIRE EUROPÉEN DE LA CHAUSSURE



Ayant à coeur de perpétuer l’excellence de la fabrication de la chaussure ancrée dans sa lignée familiale italienne depuis 1912, Vito Artioli fut désigné par ses pairs pour défendre le savoir-faire européen de la chaussure à Bruxelles.

 

Président de la marque du chausseur sur mesure, Vito Artioli préside aussi à l’Association des Fabricants de la chaussure italienne (ANCI). Enfin, il est l’un des présidents à la tête de la Confédération Européenne de l’industrie de la chaussure représentant les fabricants de chaussures appartenant à l’Union Européenne et ceux en dehors de UE (CEF). Je voulais le questionner sur ce qui fait une chaussure étiquetée made in Italy en ces temps de traçabilité des biens de consommation, et enfin comprendre cette loi votée par le gouvernement européen pour défendre le savoir-faire des fabricants italiens.

La chaussure Artioli

En self-made man à l’italienne et artisan de l’excellence, Vito maîtrise son sujet. Pas étonnant qu’il ait réussi à chausser les grands de ce monde parmi lesquels figurent Billy Wilder, l’ex-président Lula ou le Pape Jean-Paul II.

C’est en 1912 que le père de Vito, Severino a fondé cet atelier. Plus tard, le père demandera au fils de rejoindre l’affaire familiale. « Parce que la famille en Italie est la première des priorités, avant même le travail et le succès, j’ai rejoint mon père », se remémore Vito, souriant, et sans aucun regret. Pourtant, Vito avait fait du chemin de son côté. Un stage chez la multinationale italienne Olivetti le lance. Il y devient très rapidement directeur à 23 ans. Le président d’Olivetti reconnait en lui un jeune homme plein d’idées et doté d’une belle capacité de management et d’une habilité certaine dans le monde des affaires. Aujourd’hui, c’est Andrea qui se consacre à pérenniser la tradition familiale depuis 1990.

La fabrication des chaussures made in Italy

Vito explique qu’il est désormais courant d’étiqueter des chaussures du fameux Made in Italy alors que celles-ci n’ont d’italiennes que leurs finitions. On ne peut pas dire que cela soit représentatif du savoir-faire italien de la chaussure !

A peine arrivent-elles par containers dans les ports des pays Européens du nord que les chaussures arrivées souvent d’Asie sont redirigées vers des ateliers de finitions, la dernière phase de la fabrication de la chaussure avant de recevoir le label made in Italy et d’être proposées aux consommateurs dans les boutiques de luxe.

Sauf que la qualité n’est plus toujours au rendez-vous. A ce titre, le livre très instructif de Dana Thomas , Deluxe – how luxury lost its luster, fait office de très bonne enquête sur l’évolution du luxe en rendant compte de la perte de qualité des pièces issue d’une baisse des coûts de production et des délocalisations devenues courantes.

La loi du made in Italy ne passera pas !

A propos de l’approbation de la loi sur l’étiquetage du made in Italy par le parlement italien, Vito affirme qu’elle ne passera pas. La loi européenne contraint ses 27 membres à suivre une procédure avant de s’engager dans la délibération de loi relative au commerce entre les pays membres. Le gouvernement italien ayant agi dans son coin, il est hors la loi européenne.

Pourquoi s’intéresser à cette loi ? Parce qu’elle souligne une tentative légale de normaliser des pratiques de délocalisation du savoir-faire italien de la chaussure. En résumé, la loi laisserait aux importateurs de chaussures européens la possibilité de déterminer 2 des 4 phases de la fabrication des chaussures pour obtenir le label made in Italy.

Au cœur du problème, selon Vito, l’absence d’imposer ces 2 phases. Toutes les étapes de la fabrication de la chaussure n’ont pas la même importance.

Pendant la première phase, on coupe les peaux destinées à fabriquer la tige de la chaussure – toutes les parties supérieures de la chaussure situées au-dessus de la partie de la chaussure directement en contact avec le sol. La seconde phase consiste à monter la tige par la couture de tous ses composants. La troisième phase sera le montage de la chaussure sans sa globalité avec la tige et le talon assemblés. Enfin la phase finale consiste à travailler les finitions de la chaussure.

Vito donne l’exemple d’une chaussure dont seules les phases de la coupe des peaux et des finitions seraient faites en Italie. Et la fabrication de la chaussure en elle-même surtout réalisée dans les phases 2 et 3 où s’effectue le montage ?

Ne pas imposer ces phases de fabrication n’a pas de sens pour l’artisan qu’il est. Pire, il exprime sa colère vis-à-vis du gouvernement italien. « Celui-ci dit rédiger cette loi pour protéger les fabricants de chaussures italiens, mais tout ce qu’il fait, c’est écouter les lobbies composés d’importateurs européens de chaussures afin qu’ils puissent continuer de disposer du label comme ils l’entendent, sans contrainte da fabrication en Italie! Le gouvernement italien est terrible ! » Si cette loi devait passer, elle ne ferait que légaliser des pratiques courantes. Aucune obligation n’existe aujourd’hui, au sein de l’Union Européenne, d’étiqueter les made in, encore moins d’en normaliser le contenu.

Or se fier au seul label du made in Italy ne suffit pas. Il ne garantit plus l’excellence de l’artisanat italien ni des conditions de travail décentes. Prenons l’exemple des ateliers illégaux de la région de Prato, en Toscane, où est regroupée la plus grande communauté chinoise en Europe, et qui a développé un commerce conséquent de fast fashion, la mode à bas coût arrivée droit de Chine, et étiquetée made in Italy. Que reste-t-il donc de la garantie du label made in Italy ?

Vers un made in obligatoire en Europe ?

Aujourd’hui, l’étiquetage optionnel d’un label made in pourrait bien devenir obligatoire en Europe. L’Union Européenne penserait à légiférer sur le label du made in d’ici le premier semestre 2011, rapportait en octobre dernier, l’agence de presse Reuters.

L’Union Européenne défendra-t-elle une vision du savoir-faire européen, incluant la Turquie et les pays du Maghreb, comme le voudrait Vito, au nom d’un héritage romain commun ? C’est son grand souhait, nostalgique qu’il est du puissant Empire Romain : harmoniser les lois économiques et fiscales entre les pays membres et créer « une fédération des états-Unis d’Europe ».

 

 

 

 

 

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NOTES :
Artioli, site officiel
Label Made in Italy
Prato

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